Le café sans grain est-il l'avenir ? Enquête sur les alternatives au breuvage le plus consommé
Par Alice Lascelles .Publié le
2025/10/04 09:44
La consommation mondiale de café a presque doublé au cours des trente dernières années. Cette croissance est appelée à se poursuivre, notamment avec les consommateurs chinois et indiens qui délaissent progressivement leur thé traditionnel au profit du café. Une telle expansion soulève de sérieuses inquiétudes concernant l'accélération de la déforestation, la dégradation des sols et le gaspillage hydrique. De plus, l'instabilité climatique croissante – conséquence directe du changement climatique – a récemment provoqué une flambée spectaculaire des prix des grains.
L'innovation face à l'urgence environnementale
Quelle est la solution pour désamorcer cette crise ? Andy Kleitsch, un entrepreneur basé à Seattle, parie sur le café sans grain. Sa société, Atomo, produit un ersatz d'espresso à partir de végétaux recyclés (issus de l'upcycling) ou cultivés, comme les noyaux de dattes, la goyave et les graines de tournesol. La caféine est, quant à elle, extraite de thé vert riche en L-théanine, un acide aminé qui promet un effet stimulant plus durable et moins anxiogène que celui du café classique. Selon M. Kleitsch, ce mélange permet de réduire les émissions de carbone de 83 % et d'utiliser 70 % moins de terres agricoles. Le géant japonais des boissons, Suntory, compte désormais parmi les investisseurs de la marque.
« Il ne s'agit pas de mettre les cultivateurs de café au chômage », précise M. Kleitsch. « Notre objectif est de compenser la croissance de la demande que nous allons connaître au cours des 30 prochaines années. Il est impératif d'arrêter d'échanger du café contre de la forêt. »
J'ai personnellement testé le mélange « Coachella Latte Blend » d'Atomo (15,99 $ pour 340 g), un produit issu d'une collaboration avec Hagen, le premier café au Royaume-Uni à le servir. L'expérience est convaincante : le goût est remarquablement proche de l'original et, comme promis, l'effet coup de barre post-caféine est inexistant.
L'essor des concurrents et le génie de l'ingénierie du thé
D'autres entreprises rivalisent d'ingéniosité :
Le Néerlandais Northern Wonder (5,39 € pour 250 g) utilise le lupin et les pois chiches.
Le Singapourien Prefer Coffee (5 $ pour une canette de 250 ml de latte glacé à l'avoine) propose un substitut à base de riz et de soja.
Le « café alternatif » n'est, bien sûr, pas une nouveauté. En période de pénurie historique, les populations se sont souvent rabattues sur des ersatz à base de chicorée, de racines de pissenlit ou même de glands. À la Nouvelle-Orléans, la coutume veut toujours que l'on accompagne les célèbres beignets d'un café à la chicorée.
Cependant, ce qui distingue cette nouvelle génération de produits est la manière dont ils exploitent le thé pour recréer à la fois le profil aromatique du café et une dose de caféine hautement élaborée.
Dawn-Dusk (30 £ pour 250 g) : Créé pour les boutiques JW Anderson par le prestigieux marchand de thé londonien Postcard Teas. Ce mélange, issu de graines de soja kuromame torréfiées et de thés noirs artisanaux, allie la note torréfiée du café à l'onctuosité réconfortante d'une infusion de qualité. Il se prépare idéalement dans une cafetière à piston et se déguste nature ou avec du lait.
Moka-Cha (28 € pour 50 g) : Venu du Japon via Milan, ce mélange biologique à base de thé Hojicha a été conçu pour être utilisé dans les cafetières italiennes traditionnelles (moka). Sa saveur est moins celle d'un espresso fortement torréfié et évoque davantage les sous-bois truffés.
« Je voulais offrir aux amateurs de café une porte d'entrée vers l'expérience du thé japonais », confie Kenzo Terada, sommelier de thé basé à Milan. « J'ai vu un lien fort entre la machine à café italienne et la théière japonaise : dans les deux pays, presque chaque foyer en possède une. Cette connexion m'a convaincu que cela pouvait fonctionner. »
Si cette boisson sans grain parvient à séduire le marché italien, berceau de l'espresso, alors nous pourrons affirmer que l'innovation a atteint son point de rupture.
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